Hémophilie : comment protéger ses articulations ?

19 Oct 2020 | blog

Aujourd’hui, une personne atteinte d’hémophilie peut vivre presque normalement, selon la sévérité de la maladie. Oui, vous pouvez profiter de la vie et avoir une belle carrière professionnelle. Oui, vous pouvez faire du sport !

Cependant, pour maintenir cette qualité de vie, l’enjeu réside notamment dans la protection de vos articulations et l’atténuation des douleurs.

 

Comment l’hémophilie impacte-t-elle vos articulations ?

En affectant la coagulation du sang, l’hémophilie entraîne des saignements importants, spontanés ou dus à un choc ou à une blessure. Cela se manifeste notamment par l’apparition d’hémarthroses (70% à 80% des symptômes) et d’hématomes (10% à 20%).

L’hémarthrose est un épanchement intra articulaire : des saignements apparaissent dans une articulation, pouvant entraîner à terme des difficultés à se mouvoir. Ces saignements peuvent durer plusieurs jours.

Les articulations les plus menacées sont les chevilles, les genoux et les coudes, car peu protégées par des muscles.

L’hémarthrose, comprendre pour mieux la repérer

Pour mieux comprendre comment ces saignements peuvent impacter les articulations, faisons un bref point anatomique.

Les articulations sont enveloppées d’une structure élastique que l’on appelle la capsule articulaire. Elle est reliée aux extrémités des os, qui eux sont recouverts de cartilage.

De plus, la face interne de l’articulation est tapissée par une membrane synoviale. Celle-ci a pour rôle de produire le liquide synovial qui permet un glissement aisé des cartilages l’un contre l’autre lorsque vous bougez. La membrane est vascularisée par de nombreux vaisseaux sanguins. Ils sont à l’origine des saignements.

Ce sang provoque une inflammation de la membrane qui s’épaissit alors, et par conséquent, se fragilise.

Les signes de cette hémarthrose sont plutôt silencieux : quelques picotements, une sensation de chaleur, une gêne dans les mouvements. Une personne non malade ne fera pas forcément attention à de tels symptômes. Mais une personne atteinte d’hémophilie les reconnaîtra, pour agir le plus rapidement possible.

 

L’atteinte articulaire, par des saignements persistants

Si le saignement persiste, se répète et qu’il n’est pas maîtrisé, l’articulation peut se détériorer. Elle peut être gonflée de façon permanente, sensible au toucher, à l’origine de douleurs brutales, jusqu’à une perte totale de mouvement.

L’hémarthrose peut laisser la place à une synovite chronique, conséquence d’une succession de saignements intra articulaires. La membrane synoviale reste enflammée, l’articulation, quant à elle, reste gonflée, entraînant une perte de mobilité et de masse musculaire. On peut alors entrer dans un cercle vicieux : les saignements altèrent la membrane qui, fragilisée, favorise l’apparition de nouveaux saignements.

 

Prévenir l’arthropathie hémophilique à tout prix

En outre, dans sa forme la plus grave, la détérioration de l’articulation peut évoluer vers une destruction progressive. On parle alors d’arthropathie hémophilique, qui handicape les activités du quotidien. L’articulation est raide, parfois déformée et victime de contractures. L’os et le cartilage sont altérés, la masse musculaire diminue. De plus, la douleur peut devenir permanente, avec des poussées violentes lors de mouvements.

Il est donc essentiel de prévenir les saignements lorsqu’on est hémophile, pour éviter les conséquences à long terme qui impactent la qualité de vie : réduction de l’amplitude des mouvements, voire impossibilité de mouvoir l’articulation.

 

Comment protéger vos articulations ?

Si les saignements ne sont pas maîtrisés, l’articulation est susceptible de présenter par la suite de nouveaux saignements.

L’enjeu est donc de soigner un premier saignement, et de prévenir les suivants.

 

Que faire en cas d’hémarthrose ?

Connaître au mieux sa maladie est la clé pour reconnaître l’apparition d’un saignement, pour ainsi le traiter et l’arrêter le plus rapidement possible. Lorsque vous reconnaissez ces signes – picotements, raideur…, contactez votre médecin.

En attendant la consultation, immobilisez votre articulation, appliquez de la glace, qui favorisera la contraction des vaisseaux sanguins, ou compressez, et surélevez le membre atteint au-dessus du niveau du cœur pour diminuer le débit sanguin.

Selon votre situation, votre médecin vous administrera un facteur anti-hémophilique pour aider le sang à coaguler, et ainsi arrêter le saignement.

Plusieurs jours de repos, voire semaines, complétés par de la kinésithérapie, permettront à votre articulation de se rétablir. De plus, des attelles ou un appareil orthopédique pourront favoriser ce rétablissement.

Cependant, il est plus facile de prévenir que de traiter des saignements répétés qui, à force, atteignent l’articulation.

Comment prévenir l’atteinte articulaire ?

Cohabiter avec la maladie

Afin de réduire le risque articulaire et de préserver ses articulations, l’enjeu premier est de connaître au mieux sa maladie.

Pour cela, n’hésitez donc pas à échanger avec votre équipe soignante – médecin, infirmier, kinésithérapeute, etc. Posez toutes les questions qui vous passent par la tête à propos de l’hémophilie et de son impact sur votre vie quotidienne. Aucune question n’est anodine, aucune n’est ridicule.

Mais aussi, vous pouvez participer à un programme d’éducation thérapeutique du patient (ETP), organisé dans une structure de soins et validé par l’Agence Régionale de Santé.

Au travers de séances, parfois individuelles mais bien souvent collectives, vous apprenez à comprendre, gérer et vivre avec votre maladie.

Ces séances sont animées par une équipe interdisciplinaire. Médecin spécialiste de l’hémophilie, infirmier, kinésithérapeute, psychomotricien, éducateur d’activité physique adapté, etc. sont autant de ressources qui vous aideront à améliorer votre qualité de vie.

Vous apprendrez à :

  • surveiller votre maladie, pour identifier les signes avant-coureurs d’une hémorragie ;
  • décider et agir rapidement en cas d’apparition de ces symptômes ;
  • aménager votre vie quotidienne et adapter vos activités physiques ;
  • comprendre votre traitement et identifier les médicaments qui vous sont contre-indiqués ;
  • expliquer votre maladie à votre entourage et vos collègues, pour qu’ils comprennent ce que vous vivez et vous soutiennent ;
  • prendre confiance en vous et vous affirmer.

De plus, comme évoqué, pensez à aménager votre logement pour éviter les chutes, chocs et blessures : privilégiez les sols doux, les tapis et capitonnez vos meubles, etc.

Aussi, lorsque vous pratiquez une activité physique comportant des risques (même le plus minime), n’hésitez pas à porter des genouillères, coudières…

Enfin, n’hésitez pas non plus à échanger avec des personnes qui traversent la même chose que vous. À ce titre, l’Association Française des Hémophiles organise des temps de rencontres et d’échanges.

 

Pratiquer une activité physique adaptée

Certes, l’activité physique peut être un risque quand on est hémophile, mais, quand elle est adaptée, elle est un bon moyen pour préserver vos articulations.

Pour cela, consultez un kinésithérapeute. Un suivi régulier permet de :

  • entretenir vos muscles et articulations, au cours de séances de kinésithérapie
  • réduire la douleur
  • rétablir votre articulation après saignements
  • élaborer un programme d’activité physique adaptée, vous conseiller sur un sport ou vous accompagner dans votre sport actuel, ou encore vous proposer des exercices à faire chez vous

 

Consulter régulièrement son médecin

Grâce à une surveillance médicale régulière, votre médecin pourra adapter votre traitement de fond et procéder à des examens cliniques.

En effet, un traitement anti hémophilique, dit prophylactique (c’est-à-dire, par définition, préventif), grâce à l’administration d’un facteur de coagulation, permet de prévenir de potentiels saignements.

Ce traitement est adapté à votre situation et à la sévérité de votre maladie, pour protéger vos articulations.

En cas de forme grave de la maladie, il est administré par perfusions régulières.

Pour une forme modérée de l’hémophilie, vous pouvez bénéficier de ce traitement avant une activité physique mobilisant fortement vos articulations, ou avant votre séance de sport.

Selon la Haute Autorité de Santé, un adulte hémophile sévère sous prophylaxie subira en moyenne 2 saignements par an. Sans ce traitement, il peut subir jusqu’à 15 saignements. Même chose pour un enfant : 2 à 4 saignements par an en moyenne, versus 12 à 16 sans prophylaxie.

 

Ainsi, l’une des meilleures solutions pour prévenir les saignements et préserver vos articulations est de consulter votre médecin, et de ne pas hésiter à parler de ce que vous traversez. Avec votre équipe soignante, qui saura répondre à vos questions.

Avec d’autres personnes atteintes d’hémophilie, avec qui vous partagerez votre expérience et vos émotions. Et avec votre entourage, pour le sensibiliser et lui faire comprendre ce que vous vivez. Ne vous privez pas, entourez-vous et faites-vous accompagner pour améliorer votre quotidien.

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